Les résultats technico-économiques :
L’estimation des annuités de remboursement
Pour pouvoir traiter les chiffres qui ont été obtenus lors de la campagne 2020 du projet, il a fallu estimer les annuités de remboursement dans les deux systèmes en fonction des équipements dont la station dispose pour reproduire les systèmes.
L’estimation a été réalisée par une conseillère en entreprise de la Chambre d’agriculture du Rhône.
Attention la plupart des prix utilisés dans les documents suivants sont les coûts de matériels neufs.
Annuités de remboursement pour le système « classique »
Tableau 2: Liste des investissements de départ pour le système "classique" de 34 000m², durée des emprunts : bâtiment = 15 ans, tunnels et tracteur = 9 ans, matériel de récolte, d’irrigation, outillage = 5 ans. Après relecture nous nous sommes rendu compte qu’il manque l’investissement dans le matériel de transport qui représente environ 40 000€ pour ce système (fourgon, fourgonnette, balances, tables de marché, barnum)
Dans le système classique (Tableau 2), soit une exploitation de 3,4 hectares, l’investissement de départ s’élève à plus de 360 000 €, générant une annuité de remboursement de 45 855 €. Cela peut paraître élevé mais cette somme prend en considération le montage et l’automatisation de l’ouverture des tunnels, de l’irrigation et l’achat de tous les matériels nécessaires avec le tracteur. La simulation tient compte également d’un bâtiment neuf tout équipé. L’annuité de remboursement en année 1, s’élève à 1 348€ pour 1 000m² de SAU.
Annuités de remboursement pour le système « petite surface»
Tableau 3 : Liste des investissements de départ pour le système "petite surface" de 7 000m², durée des emprunts : bâtiment = 15 ans, tunnels = 9 ans, matériel de récolte, d’irrigation, outillage, motoculteur = 5 ans. Après relecture nous nous sommes rendu compte qu’il manque l’investissement dans le matériel de transport qui représente environ 20 000€ pour ce système (fourgon, balance, tables de marché, barnum)
Dans le système « petite surface » (Tableau 3), soit une exploitation de 7 000m², l’investissement de départ s’élève à 166 900€. Cet investissement génère une annuité de remboursement de 20 345€. L’investissement de départ dans le système expérimental est conséquent quand on sait que la plupart de porteurs de projet ne souhaitent pas dépasser 50 000€. Le coût peut cependant être facilement réduit d’un tiers en achetant du matériel d’occasion. Cette somme comprend aussi le montage et l’automatisation des tunnels et de l’irrigation. L’annuité de remboursement en année 1, s’élève à 2906€ pour 1 000m² de SAU. Rapporté à la surface, elle est deux fois plus élevée que pour le système classique, il faut donc, dans un système « petite surface », trouver les moyens d’augmenter les rendements au m².
Les résultats économiques
Pour quantifier les ventes de légumes, la mercuriale de prix AURABIO en 2019 a été utilisée. Ce sont les prix de légumes AB, vendus dans la région Auvergne-Rhône-Alpes en vente direct.
Attention, aucun produit n’étant vendu par la station d’expérimentation, les chiffres présentés ci-dessous ne sont qu’une estimation, en tenant compte de tous les légumes récoltés, et ayant une qualité suffisante pour être présents sur un étal en vente direct. Les légumes de conservation ont été stockés et une quantité est sortie chaque semaine pour prendre en compte les pertes liées au stockage. L’expérimentation ayant commencé au début d’année 2020, le premier cycle de production n’était pas bouclé en fin d’année 2020. Par conséquent, la fin des ventes de tous les légumes stockés en chambres froides ou au champ n’est pas prise en compte alors que les coûts de production sont comptabilisés, ce qui impacte les résultats chiffrés suivants. C’est le cas des poireaux, des carottes, des courges, des pommes de terre de conservation, des navets, etc.
Les fiches de culture
Pour toutes les cultures dans les deux systèmes, une fiche récapitulative a été rédigée (Tableau 4 et 5), récapitulant, sur la première ligne, le nombre de mètre linéaire de planches de culture ainsi que le nombre de plants. La surface utilisée pour calculer la densité de plantation comprend la planche et le passe pieds.
Ensuite le détail des charges opérationnelles est présenté dans les tableaux (4 et 5). Pour les charges de structure communes et spécifiques, elles ont été estimées grâce aux études réalisées par le BTM/CA69 pour les deux types de systèmes.
Les annuités de remboursement (décrites dans le chapitre précédent) ont été réparties en fonction de la surface de production.
Le chiffre d’affaire brut de la culture est obtenu en prenant en compte le prix de vente moyens des légumes comme décrit dans le paragraphe ci-dessus. Le chiffre d’affaires net de la culture est, quant à lui, obtenu en enlevant la TVA au chiffre d’affaires brut (soit : CA brut – 5,5%*CA brut = CA net).
Le résultat est calculé en soustrayant les annuités de remboursement et les charges au chiffre d’affaires net.
Des indications sur les temps de travaux, les rendements et le nombre de produits récoltés sont aussi mis en avant.
Les fiches de chaque culture pour les deux systèmes seront disponibles sur le site : https://www.mips-aura.fr dans la rubrique résultats technico-économiques.
Tableau 4: Fiche de la culture de la tomate, système « petite surface », MIPS 2020
Tableau 5: Fiche de la culture de la tomate, système "surface classique", MIPS 2020
Synthèse des données du système « petite surface »
Tableau 6: Récapitulatif de production du système "Petite surface", MIPS 2020
Le résultat présenté dans le précédent tableau semble être très largement supérieur aux références des exploitations diversifiées de la région. A la suite de discussions avec les membres du comité de pilotage du projet MIPS (producteurs et conseillers techniques), il semblerait que les temps de travaux soient sous-estimés. En effet, sur le système expérimental seul le temps de travail productif est comptabilisé et même en rajoutant 25% de temps de travail pour la commercialisation et la gestion administrative, le total annuel d’heures travaillées semble faible.
De nombreux temps « improductifs » ne sont pas pris en compte ou sont mal estimés dans l’expérimentation, ce sont les temps de formation, de surveillance des cultures, d’entretien du matériel, … .
Une prochaine version de ce tableau sera disponible avec un ajustement des temps de travaux.
Cette année, la surface développée de plantations a été de 1 136 m² pour une SAU du système miniature de 1 000 m². Si l’on regarde les coefficients d’utilisation de la surface, on obtient 2,05 rotations sous abri, 0,97 rotation en plein champ et 0,92 rotation sous le tunnel mobile. Le système n’a donc pas été intensifié de ce point de vue. En effet dans différentes études, il ressort que le nombre de rotations moyen sous abri est compris entre 2 et 2,5 et en plein champ il se situe autour de 1. On observe cependant que le tunnel mobile a permis de dés-intensifier le nombre de rotation pour un abri. En effet, il y a, en moyenne, qu’une seule culture par planche mais l’abri est déplacé sur trois emplacements différents au cours de la saison. En revanche, la succession de culture a dû être adaptée en comparaison d’un tunnel fixe.
Le chiffre d’affaires HT obtenu sur 1 000 m² est des 10 212 € pour l’année 2020, soit une estimation d’un chiffre d’affaires de 71 485 € pour une exploitation à taille réelle de 7 000 m². Soit 8,99€ par m² développé ou 10,21€ par m² de surface utile.
Le total des charges et des annuités de remboursement représentent 55% de ce chiffre d’affaires. Le résultat courant est donc égal à 4 519 € sur le système miniature, soit une estimation de 31 639 € pour un système à taille réelle. Le résultat courant est au-dessus des espérances de départ. Il faut cependant noter que toutes les productions commercialisables ont été comptabilisées. Pour obtenir une estimation plus précise, il faudrait enlever les pertes dues à la non vente et la part autoconsommée.
Si l’on rapporte le temps de travail à un système de 7 000m², l’exploitant aurait travaillé en moyenne 39,29 heures par semaine avec des pics à 60 heures en saison estivale. Et si l’intégralité de la main d’œuvre de l’exploitation avait été salariée, en prenant un coût moyen d’un salarié à 14,50€ de l’heure travaillée, le résultat aurait été de 5 432€.
Synthèse des données du système « classique »
Tableau 7: Récapitulatif de production du système "classique"
Le résultat présenté dans le précédent tableau semble être très largement supérieur aux références des exploitations diversifiées de la région. A la suite de discussions avec les membres du comité de pilotage du projet MIPS (producteurs et conseillers techniques), il semblerait que les temps de travaux soient sous-estimés. En effet, sur le système expérimental seul le temps de travail productif est comptabilisé et même en rajoutant 25% de temps de travail pour la commercialisation et la gestion administrative, le total annuel d’heures travaillées semble faible.
De nombreux temps « improductifs » ne sont pas pris en compte ou sont mal estimés dans l’expérimentation, ce sont les temps de formation, de surveillance des cultures, d’entretien du matériel, de gestion des salariés, … .
Une prochaine version de ce tableau sera disponible avec un ajustement des temps de travaux.
Pour l’année 2020, la surface développée de plantation a été de 2 513 m², pour une SAU totale de 2 160 m². Les taux de rotations sont de 2,37 sous abris et de 1,01 en plein champ. Ils sont légèrement supérieurs à ceux du système « petite surface » mais restent dans la moyenne des exploitations diversifiées régionales.
Le chiffre d’affaires HT de notre système miniature a été de 14 393 €, soit pour un système à taille réelle un chiffre d’affaires de 226 689 €. Soit, 5,73 € par m² développé ou 6,66 € par m² de surface utile.
Les charges et annuités de remboursement représentent 46,6% du chiffre d’affaires net, soit près de 10% de moins que sur le système « petite surface ». Le résultat courant est de 7 685 € sur le système miniature, soit une estimation de 121 040 € pour un système à taille réelle. Et si l’intégralité de la main d’œuvre de l’exploitation avait été salariée, en prenant un coût moyen d’un salarié à 14,50€ de l’heure travaillée, le résultat aurait été de 52 450 €.
Le temps de travail hebdomadaire par exploitant est de 51,42 heures en moyenne sur l’année. Ce temps de travail est très certainement légèrement sous-estimé dans le système expérimental. En effet, les temps de déplacement entre les parcelles et les temps d’entretien et de réparation du matériel sont difficiles à estimer, très variables d’une exploitation à une autre.
Synthèse des résultats par culture
Figure 31: Résultat courant d'exploitation en fonction des cultures du système "petite surface", MIPS 2020
Les cultures permettant d’assurer un bon niveau de résultat, sont en premier lieu les trois principales cultures estivales : tomates, aubergines et courgettes. Dans ce système, le mesclun obtient aussi un résultat élevé. Ces cultures sont incontestablement rémunératrices, mais ce sont surtout des cultures ayant une productivité au m² élevée. Elles occupent peu de surface et sont donc peu impactées par la répartition des charges de structure et par les annuités de remboursement. Ces cultures sont cependant plus chronophages ; et si les annuités de remboursement et les charges de structure sont réparties en fonction du temps passé sur les cultures, le résultat de ces dernières diminue alors que d’autres cultures comme les courges ou les choux voient leurs résultats augmenter (Annexe 1).
Attention, certaines cultures comme les choux, les poireaux, les courges, ou encore les oignons ne sont pas totalement vendues en 2020. Il faudra attendre l’année 2021 pour avoir une saison complète et donc des chiffres cohérents.
Pour les cultures d’épinards, de laitues et de pois, les résultats négatifs représentent des difficultés de production qui se sont traduits par de faibles rendements. Ces cultures, particulièrement la laitue, seront à améliorer en 2021 dans le système « petite surface ».
Figure 32 : Résultat courant d'exploitation en fonction des cultures du système "classique", MIPS 2020
Tout comme dans le système « petite surface », les cultures permettant d’assurer un bon niveau de résultat sont les cultures estivales. Les carottes et les pommes de terre nouvelles obtiennent aussi un bon résultat. De la même manière que dans le système « petite surface », les cultures occupant le plus de surface voient leurs résultats fortement impactés par la répartition des charges de structure et des annuités de remboursement (Annexe 2).
Attention, certaines cultures comme les pommes de terre de consommation, les choux, les poireaux, les courges, ou encore les oignons ne sont pas totalement vendus en 2020, il faudra attendre l’année 2021 pour avoir une saison complète.
Pour l’année 2021, les cultures de laitues, de patates douces et de pois seront à surveiller pour améliorer la productivité.
Tableau 8: Récapitulatif de production dans l'expérimentation MIPS 2020, PS = système "Petite Surface", SC = système "Surface Classique"
Le précédent tableau (8) permet de visualiser rapidement les différences de production entre les deux systèmes.
Les densités de plantations sont en moyenne 1,5 à 2 fois supérieures dans le système « petite surface » comparé au système « classique ». Seulement quelques cultures ont une densité égale ou plus faible, c’est le cas des concombres par exemple : 2 rangs/planche dans le système « classique » alors qu’il n’y en a qu’un dans le système « petite surface ». Effectivement pour certaines cultures, il est impossible de garder le même nombre de rangs entre une planche de 80 cm de large et une planche de 1,25 m.
Concernant les rendements par m², selon les cultures il y a deux possibilités : soit ils sont largement supérieurs dans le système « petite surface », soit ils sont équivalents entre les deux systèmes. Dans le premiers cas, cela signifie qu’augmenter la densité permet d’augmenter le rendement, les cultures concernées sont, par exemple, les aubergines ou les tomates. Dans le deuxième cas, cela signifie que les densités pratiquées dans le système « classique » permettent déjà d’obtenir un rendement optimal. Pour ces cultures, le fait d’augmenter la densité, augmente la compétition entre les plantes et diminue donc le rendement par plante. Le plus grand nombre de plants au m² permet cependant de garder un rendement au m² équivalent dans les deux systèmes. Les cultures concernées sont, par exemple, la mâche ou les courgettes.
Les dernières données intéressantes dans ce tableau sont les temps de production pour un kg de légumes. Pour la majorité des cultures, le temps de travail est plus important dans le système « petite surface ». Cela s’explique entre autres, par des travaux de sols plus chronophages, par des actions de palissage et de taille rendues plus difficiles à cause des densités de plantation plus élevées. Finalement, des cultures comme les tomates ayant un rendement au m² presque deux fois supérieur dans le système petite surface, se retrouvent avec le même temps de travail par kg de légumes produits que dans le système « surface classique ».
Attention, les tomates du système « classique » ont toutefois été impactées par les nématodes. La saison 2021 permettra de mieux comparer les données de production entre les deux systèmes pour cette culture.
Conclusion
Cette première année de mise en production à échelle réduite dans deux systèmes maraichers au sein de la SERAIL a permis de collecter de nombreuses données technico-économiques. Les premiers chiffres avancés sont encore peu fiables (saison de production incomplète, première année du projet) et ne permettent en aucun cas d’en tirer des certitudes. Même si la miniaturisation des systèmes semble réaliste en comparant les résultats obtenus sur le système « classique » avec ceux de l’étude de la CA69 sur les exploitations de 2 à 5 hectares. Ils nous permettent tout de même de valider cette expérimentation.
Plusieurs points paraissent tout de même intéressants à remarquer :
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Les forts investissements avant l’installation des systèmes semblent avoir permis d’obtenir un résultat positif dès la première année malgré une forte annuité de remboursement.
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La densification des cultures semble permettre en général d’augmenter les rendements par m², mais ne permet pas de diminuer le temps de travail par kg de légumes produits. La plus faible mécanisation dans le système « petite surface » contribue aussi à augmenter le temps de travail par kg de légumes produits.
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Il est essentiel de bien maitriser certaines cultures estivales comme les tomates, les aubergines ou encore les courgettes car elles contribuent grandement à l’obtention d’un résultat d’exploitation positif.
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Dans le système « petite surface », le tunnel a permis de dés-intensifier les rotations en utilisant trois fois l’abri dans la saison mais qu’une fois le sol à chaque emplacement.
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Le choix d’un pourcentage d’abris plus élevé semble s’avérer judicieux pour être compétitif dès la première année.
Le tableau 9 permet de visualiser facilement les principales limites et les principales qualités des deux systèmes étudiés.
Tableau 9: Forces, faiblesses, opportunités, menaces pour les deux systèmes étudiés dans le projet MIPS, 2020
L’expérimentation continue lors de la campagne 2021. Le but de l’année sera de confirmer les premiers résultats obtenus en 2020, tout en commençant à améliorer certaines techniques de production dans le système « petite surface », que nous avons identifiées comme responsables de pertes de production. Une attention particulière sera apportée à la culture de laitues, jugée essentielle par les producteurs participant au comité de pilotage. Sur leurs propositions, un pourcentage des ventes sera retiré des données chiffrées de 2021 pour prendre en compte la part d’autoconsommation et de non vente.
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N'hésitez pas à nous faire parvenir vos éventuelles remarques qui pourraient contribuer à l'amélioration de ce
document : station.serail@wanadoo.fr.
L’utilisation des données contenues dans ce document ne saurait engager la responsabilité de ses rédacteurs.
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Compte rendu année 2020 : Maraîchage Intensif sur Petite Surface en Auvergne-Rhône-Alpes (Avril 2021)
Ecriture : Grégory CHANTRE (SERAIL)
Relecture : Dominique BERRY (Chambre d'agriculture du Rhône), Alexandre BURLET (SERAIL), Claire
DUCOUROUBLE (SERAIL), Stéphane FLAMMIER (SERAIL), Ghislaine RIVOLLIER (SERAIL).
Merci à toute l'équipe de la SERAIL qui a fait vivre le projet tout au long de l'année 2020 !
Annexe 1Â
Figure 33: Résultat courant d'exploitation en fonction des cultures du système "petite surface", MIPS 2020 (Clé de répartition des annuités de remboursement et des charges de structure en fonction du temps passé par culture)
Figure 34: Résultat courant d'exploitation en fonction des cultures du système "petite surface", MIPS 2020 (Clé de répartition des annuités de remboursement et des charges de structure en fonction du chiffre d'affaires par culture)
Annexe 2Â
Figure 34: Résultat courant d'exploitation en fonction des cultures du système "petite surface", MIPS 2020 (Clé de répartition des annuités de remboursement et des charges de structure en fonction du chiffre d'affaires par culture)
Figure 35: Résultat courant d'exploitation en fonction des cultures du système "classique", MIPS 2020 (Clé de répartition des annuités de remboursement et des charges de structure en fonction du temps passé par culture)
Figure 36: Résultat courant d'exploitation en fonction des cultures du système "classique", MIPS 2020 (Clé de répartition des annuités de remboursement et des charges de structure en fonction du chiffre d'affaires par culture)
Annexe 3Â